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Deux enquêtes réalisées par l’Insee à 12 ans d’intervalle (1986 et 1998) permettent aujourd’hui de donner quelques indications sur la place du dîner dans la soirée des
Français et sur la manière dont il s’inscrit au sein des autres activités. Nutrinews a suivi les travaux du sociologue Thibaut de Saint Pol*.


LÂ’espérance de vie des Français est particulièrement élevée: 78 ans chez les hommes et 84 ans chez les femmes. Côté cœur, la France va plutôt bien aussi et, côté obésité, la situation ne semble pas aussi alarmante que dans dÂ’autres pays… Notre façon de manger (la régularité des prises alimentaires, le maintien des repas structurés) y serait-elle pour quelque chose? Si certains sÂ’interrogent sur les multiples facettes du «paradoxe français», dÂ’autres se penchent sérieusement sur nos habitudes alimentaires. A cet égard, lÂ’INSEE rappelle, à travers deux enquêtes menées à 12 ans dÂ’intervalle, la grande stabilité du dîner et lÂ’importance du «temps alimentaire» en France.

En France : on dîne à 20heures…
Contrairement à d’autres pays d’Europe (le Royaume-Uni, par exemple) qui étalent leurs prises alimentaires tout au long de la journée, on observe en France une forte synchronisation des repas, notamment en ce qui concerne le dîner. Les enquêtes de1986 et1998 font toutes deux apparaître une concentration des prises alimentaires entre 19h00 et 21h00. Le pic se situant juste après 20h00 en 1998. Cette concordance témoigne du caractère social de l’organisation du temps de repas. Le «temps alimentaire» s’harmonise en effet avec plusieurs «temps sociaux».

La décision de dîner à une certaine heure ne dépend pas uniquement du rythme biologique et de la perception de faim. Activité principale de la soirée pour la majorité des Français – ils y consacrent 42 minutes en moyenne-, le dîner prend place au milieu dÂ’autres activités (travaux ménagers, études, sorties, télé) qui diffèrent selon l’âge et lÂ’activité professionnelle, mais aussi et surtout selon le sexe. Les soirées des femmes et des hommes se différenciant fortement par lÂ’importance des travaux ménagers !

Les femmes à la cuisine, à la lessive, au ménage.
Le travail domestique apparaît comme une constante des emplois du temps féminins. La préparation du dîner, le linge, le ménage leur prend en moyenne une heure tous les soirs. Ainsi, repas et tâches ménagères occupent au moins 80% de la population féminine entre 19h10 et 20h30, pour atteindre même 99% à 19h50. Les tâches ménagères sont moins présentes dans la soirée des plus jeunes : en moyenne 25 minutes, contre 53 minutes pour les femmes plus âgées. Selon qu’elles travaillent à l’extérieur ou qu’elles restent à la maison, selon qu’elles vivent seules ou en couple, la soirée des femmes se rythme différemment. Ainsi, pour certaines (surtout celles qui vivent en couple, avec enfant(s) et restent au foyer) la période d’après-dîner débute vers 20h30 ou 21h00, et elle est principalement consacrée à la télé. D’autres femmes, plus âgées, préfèrent avancer l’heure du dîner, pour débuter la soirée plus tôt et se consacrer à une multitude d’activités: loisirs, télévision, lecture, musique, sans oublier tout

Ce rituel alimentaire pourrait avoir des bénéfices santé, ce qui a trait à la famille et à la maison: soins et éducation des enfants, etc. DÂ’autres encore, surtout parmi les femmes actives, débutent une «deuxième journée de travail» dès leur arrivée à la maison : repas entre 20h00 et 21h00, précédé par des tâches ménagères (cuisine surtout), et souvent suivi par dÂ’autres tâches ménagères…

Et les hommes à la télé!
Regarder la télévision apparaît comme une pratique plus masculine. Ainsi, la soirée type de beaucoup dÂ’hommes (notamment parmi les plus de 55 ans, les moins diplômés, les retraités…) se découpe en deux parties : le repas (entre 19h et 20 heures, heure du journal) et la télé. Pour dÂ’autres, ce sera la séquence télé, repas, télé, le repas constituant une sorte de rupture entre deux épisodes de télévision. SÂ’il est alors probable que la télévision nÂ’est pas éteinte pendant le temps du dîner, elle devient cependant une activité secondaire. Enfin, pour certains (habitants des grandes villes, commerçants ou artisans, enseignants) cÂ’est le travail (les temps de trajet, les horaires, les études ou les corrections de copies) qui dicte lÂ’heure du repas. Sa durée est souvent plus faible que pour les autres), de même que le temps consacré à la télévision. La soirée des hommes se caractérise généralement par lÂ’absence de tout travail domestique. Ce qui sÂ’explique par le fait quÂ’ils sont nombreux à vivre en couple et à pouvoir se décharger des corvées sur leur conjoint.

Un temps fort de la sociabilité.
Les travaux de l’Insee mettent en tout cas en évidence, à travers la diversité des pratiques, un lot commun d’expériences, partagées quotidiennement par de nombreux Français. Tous les sociologues observent que la synchronisation des repas est un enjeu essentiel dans la cohésion interne d’un groupe et, à plus petite échelle, d’une famille ou d’un couple. Le dîner est non seulement un moment de sociabilité, mais aussi un temps de socialisation pendant lequel les parents transmettent à leurs enfants un certain nombre de valeurs et de règles. Contrairement à ce que supposent les discours sur la déstructuration des repas traditionnels, la comparaison des deux enquêtes de 1986 et de 1998 fait apparaître que le dîner est toujours présent et occupe une place de choix dans la soirée des Français. Il constitue encore un repas «réglé», une étape obligée dans l’emploi du temps quotidien et traduit une tendance solide de notre comportement alimentaire. Tendance qui pourrait expliquer, du moins en partie, le bon état de santé de beaucoup de nos concitoyens. Le samedi soir: un dîner un peu particulier Pour beaucoup de Français, le repas du samedi soir revêt un caractère exceptionnel et s’inscrit dans une pratique de loisir ou de sociabilité, avec les invitations de parents ou d’amis, les sorties, etc. La télé est généralement moins présente le samedi soir et le temps consacré au dîner est en moyenne plus élevé (1 heure, voire 2heures, contre 42 minutes
le reste de la semaine).

*Thibaut de Saint Pol est membre du laboratoire de sociologie quantitative du Centre de recherche en économie et statistique (Crest) de lÂ’Insee et appartient également à lÂ’Observatoire sociologique du changement (FNSP, CNRS). Insee – Economie et statistiques – n°400 – 2007 

Sources Nutrinews

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